L'ultra-trail de Belle-Ile-en-Mer : Récit d’une expérience inoubliable pour David Cano, responsable électronique du Team Actual

David Cano, responsable électronique du Team Actual

Après 10 mois de préparation intense, me voilà enfin au départ de l'Ultra-Trail de Belle-Ile-en-Mer. Une aventure de 81 km autour de cette magnifique île bretonne, avec 2300 m de dénivelé, tout en longeant le sentier côtier. Depuis le moment où j’ai appris que j’étais sélectionné parmi les 500 participants, sur 15 000 demandes, je n’avais plus qu’une idée en tête : vivre cette expérience à fond et tout donner.

Cette course a été pour moi un véritable défi. Il y a 4 ans, je débutais la course à pied, à 42 ans, pendant le confinement du Covid-19. À l'époque, je ne courais pas plus de 10 km. Jamais je n’aurais pensé pouvoir participer à un tel événement, encore moins terminer 20ème au classement général et 2ème dans ma catégorie M2 (plus de 45 ans) en 8h17. C’est un résultat incroyable !

Une préparation de longue haleine

Ma préparation a véritablement commencé en novembre 2023, au moment de mon inscription, 10 mois avant la course. J’ai construit mon programme au fil du temps, en m’appuyant sur mon propre ressenti. J'ai d'abord testé pendant un mois ma capacité à encaisser un footing quotidien de 10 km

J’ai ensuite rejoint deux clubs près de chez moi, qui m'ont aidé à structurer mes semaines autour de 6 à 7 séances d'entraînement, cumulant jusqu’à 100-120 km par semaine. Je faisais deux séances de fractionné avec le club d'athlétisme "CIMA Pays d'Auray" pour travailler la vitesse et l'intensité. En parallèle, je faisais des footings plus calmes, dont une sortie longue, avec le club "Courir à Erdeven". Et pour peaufiner mon endurance spécifique aux trails, je partais seul en forêt et en terrain accidenté, ajoutant du dénivelé à mes entraînements.

Pour maintenir ma motivation, j'ai aussi participé à plusieurs compétitions intermédiaires. Un des tournants de ma préparation a été en avril, avec le Trail de Guerlédan (65 km, 2600 m de D+), réputé pour être un des plus difficiles trails bretons. Bien que je n’aie pas pu faire la performance espérée à cause de douleurs aux quadriceps, cette expérience m’a fait réaliser que je n’étais pas encore prêt pour Belle-Ile.

Ma confiance est revenue après l’Ultra Marin en début juillet (70 km, un terrain plus roulant sans dénivelé), où je termine 11ème sur 1000 participants. Cette course m’a montré que je pouvais gérer des distances longues sans douleurs, en jouant avec la tête de course.

J’ai ensuite intensifié ma préparation technique et musculaire pendant les deux mois d’été, avec des séances dédiées au renforcement des jambes et au travail en côte. À la fin de l'été, à trois semaines de Belle-Ile, j’étais mentalement et physiquement prêt.

Le jour J : émotions, efforts et soutien familial

Le départ fut donné à 6h du matin, encore dans l’obscurité. J’ai pris le départ ambitieux que j'avais prévu, en partant avec la tête de course. J'ai rapidement laissé les cinq premiers partir, mais je me suis retrouvé en tête du deuxième peloton. Courir à la lampe frontale sur ce sentier côtier avec, derrière moi, une colonne de petites lumières, fut un moment impressionnant, presque irréel.

J'ai conservé cette place de 6ème jusqu'au premier ravitaillement. Mais cette ambition a eu un prix. À partir du 25ème km, j'ai commencé à me faire rattraper. Chaque coureur qui me dépassait entamait un peu plus mon moral. J’ai craint d’avoir mal géré mes efforts et d’avoir brûlé trop d’énergie dès le début. Heureusement, à chaque ravitaillement, ma famille était là. Ils m’encourageaient, me rassuraient et me rappelaient que j'étais encore dans les temps prévus.

Je leur avais donné des temps de passage pour viser entre 8h et 8h30 de course. Ces moments de soutien étaient cruciaux. Mes filles, surtout, ont été mes piliers. À un moment clé, au dernier ravitaillement, elles m’ont rappelé mon regain d'énergie à la fin du Trail de Guerlédan. Cet encouragement m’a donné la force de relancer dans les 15 derniers kilomètres, où j’ai réussi à reprendre 5 places.

facu.ratti (crédit photo)

Le recul : apprentissages et perspectives

Après coup, je réalise que mon corps a trouvé son propre rythme, une allure qui m’a permis de faire une course "confortable". Pourtant, avec du recul, je sais que j’aurais dû démarrer plus prudemment pour mieux vivre ma course et espérer un meilleur résultat. J’ai vu d'autres coureurs, plus expérimentés, partir lentement et remonter progressivement dans le classement. Ce sont des leçons précieuses pour mes prochains défis.

Je m'inspire aussi beaucoup de mon expérience dans le Team Actual. Comme en course au large, la préparation d'un trail doit être rigoureuse. Mon équipement est choisi pour être léger, confortable et performant. Je porte une attention particulière à l’alimentation, testant les aliments à l’entraînement pour éviter les mauvaises surprises en course. Toute cette préparation matérielle m'aide à me sentir prêt mentalement. Dans les moments difficiles, je pense souvent à l'engagement mental des marins, partis pour des courses de plusieurs semaines. Cela m'aide à relativiser mes difficultés qui, elles, ne durent que quelques heures.

Ce que je retiens surtout, c’est la dimension humaine de cette aventure. Partager ces moments avec ma famille a rendu cette expérience encore plus spéciale. Leur présence à chaque ravitaillement, leur soutien moral, et même l’aide logistique ont largement contribué à ma performance. Cette solidarité familiale est sans doute le plus beau souvenir que je garderai de cet ultra-trail.

Et après ?

L'année 2025 s'annonce comme une nouvelle étape dans ma pratique du trail. J’ai pris la décision de travailler avec un coach pour personnaliser et affiner ma préparation. Ensemble, nous sommes en train de construire un programme intelligent pour progresser durablement.

À peine la ligne d’arrivée franchie à Belle-Ile, je cherchais déjà un nouvel objectif, notamment un ultra trail de 100 km en Bretagne prévu en décembre. Mon idée était d'y participer en mode "aventure", mais mon coach, qui a déjà cerné ma mentalité, m’a conseillé de ne pas y prendre part. Selon lui, j'aurais du mal à m’empêcher de me laisser emporter par l’esprit de compétition, ce qui risquerait de compromettre une préparation hivernale solide pour la saison 2025.

L'objectif est donc de prendre le temps de progresser sereinement, pour être en capacité de participer à des ultras en montagne. Mon coach pense qu’on peut élaborer un programme qui allie mes deux envies : participer au Ouest Trail Tour, qui réunit les sept plus grands trails de Bretagne, et une introduction progressive aux trails de montagne. J’ai hâte de voir ce que 2025 nous réserve et de relever de nouveaux défis avec cette approche plus structurée.

Suivant
Suivant

Anthony Marchand : "Un bel apprentissage"